Visionnages: juin 2010

Mitchell a écrit:Je suis un peu comme Chao concernant Solomon Kane. Découvert cette semaine et, sans constituer une bonne surprise après l'avis de Colqu', j'ai trouvé ça très cool. En fait j'ai surtout trouver tout le passage avec la famille de Postlethwaite passionnant. La rédemption du personnage, le massacre qui s'en suit et puis le charisme des 2 acteurs m'a beaucoup plût. Dommage que, par la suite, malgré la sincérité et l'ambition de l'opération, le film perde peu à peu de son intensité et de sa force. Notamment avec une fin assez bof, avec un méchant plutôt nul. Mais bon, le personnage de Solomon est très réussi.

Sorry guys, j'aurais aimé partagé l'enthousiasme des happy few, mais... j'ai trouvé ça définitivement ringard. D'autant plus dommage que, comme vous le dites, le perso en impose. Mais à part ça, rien à faire... Ah si, le prologue avec les miroirs cannibales est très rigolo.

Et le Balrog final quoi!

Mitchell a écrit:En fait j'ai surtout trouver tout le passage avec la famille de Postlethwaite passionnant. La rédemption du personnage, le massacre qui s'en suit et puis le charisme des 2 acteurs m'a beaucoup plût.

voila, pour moi, là on a un perso qui existe vraiment -malgré la voix HeMan de Purefoy- et un genre de perso que j'ai plus vu depuis un moment dans ce genre de films. Un personnage assez et bien écrit pour que j'ai envie de le suivre et d'en savoir plus sur lui.

Oui Loval, le Balrog final, comme le début, est très nul. Mais je comprends pas la haine que toi et Sam avez eu pour ce film à Sitges. Il le mérite pas.

sinon, j'ai eu accès à un screener et je vais faire plaisir à Bothrops:

A SERBIAN FILM est très mauvais. J'ai pas été choqué du tout, j'ai même bien ri par moments.
Et je respecte le choix du NIFFF de pas le passer, car c'est pas parce qu'un film a du buzz et un potentiel "indistribuable" qu'il faut jouer le jeu.
Là certains d'entre vous vont prendre ça pour un compliment, mais pour moi c'est un film à ranger auprès de FUNNY GAMES: ca joue sur une idée de départ (et des idées plus précises au fur et à mesure) potentiellement choquante(s), mais on sent tellement une volonté de provoquer une réaction outrée de la part des auteurs que ca en devient anodin.
Et donc j'ai juste envie de revoir MARTYRS (pour prendre le film "choc" de l'année passé) qui lui mêle violence, "subversion" et vraie émotion. (Et je respecte bien plus Laugier -malgré nos (ses) différents- qui a des vraies choses à exprimer plutot que ces Serbes qui se la jouent provoc comme arguement de départ.)
Bref, beaucoup de bruit pour rien.

EASTERN PROMISES (David Cronenberg)

David Cronenberg a toujours été fasciné par le corps et ses mutilations, ses mutations, ses transformations, sa corruption par le monde extérieur ou par l'être lui-même. Qu'il s'agisse de Scannners, Chromosome 3, La mouche ou encore Vidéodrome, le metteur en scène canadien développe film après film le thème du corps, en soumettant ce dernier à des outrages venant signifier sa fragilité, sa maléabilité, ou usant de la métaphore pour mettre en exergue le corps comme pure machine, in fine sexuelle (l'admirable Crash), en l'espèce véritable objet mécanique et industriel.
Avec A history of violence, Cronenberg opérait un virage tout sauf thématique (le corps est toujours le point central du film), mais déplaçait son propos sur le terrain du corps comme élément identitaire, en jouant sur sa transformation dans son rapport à l'autre. Eastern promises s'inscrit dans la continuité de cette évolution, de la plus admirable des manières.

Le film raconte l'histoire d'une sage femme (Naomi Watts) enquêtant sur l'indentité d'une adolescente décédée en mettant au monde une petite fille. Ses investigations la mèneront vers le milieu de la mafia russe implantée à Londres. Elle y cotoiera ainsi le chef de clan (Armin Mueller-Stahl), son fils (Vincent Cassel), et son homme de main (Viggo Mortensen).

Loin de constituer un polar mafieux, Eastern promises utilise au contraire les codes du genre pour porter son propos sur un terrain bien plus intimiste, touchant à l'identité des êtres, à leur rapport au monde, à la fuite du corps en tant que bloc identitaire.

Plaçant son film à l'époque de Noël, Cronenberg opère un saisissant effet de contraste entre l'environnement des personnages et leur profonde tristesse. Londres devient ainsi le miroir de l'état intérieur des êtres qui parcourent le film, et est exposée d'une manière extrêmement sombre, glauque, désespérée. Il s'agit ici de saluer l'admirable travail du chef opérateur Peter Suschitzky qui confère à la capitale britannique une aura véritablement tragique.

Dans ce cadre d'une infinie tristesse, Cronenberg s'attache à dépeindre des êtres ayant fui leur existence pour en débuter une autre. Ainsi, qu'il s'agisse de la jeune femme au centre de l'intrigue ou d'un autre personnage clé (dont l'identité ne sera pas dévoilée dans ces lignes), la transformation du corps de l'exilé pour l'intégrer à une vie nouvelle est mise en avant du début à la fin du film. Le corps, à nouveau, sera exposé dans sa nudité la plus abolue dans une scène de combat anthologique à l'intérieur d'un sauna.

L'être se définit-il avant tout par son corps ? C'est cette question qui est au centre de Eastern promises, ces "promesses de l'Est" constituant une terrible métaphore mêlant prostitution, mort et faux semblants, mais apportant également lumière et délivrance.
Organique, charnel, physique, le dernier film en date de David Cronenberg interroge, fascine, et témoigne de l'inspiration toujours intacte de l'un des plus grands réalisateurs en activité.

Et ici la thématique du corps prend une nouvelle dimension avec le rituel des tatouages.

Bon faut pas trop en faire non plus sur la thématique du corps comme élément HYPER important dans les derniers films de Cronenberg; j'y vois un peu de la branlette de journaliste à analyser ce corps tatoué en fonction des anciens films de Cronenberg. Le mec est tatoué ok, c'est pour l'histoire, pas besoin d'en faire tout un plat.

lorenzo a écrit:Organique, charnel, physique, le dernier film en date de David Cronenberg interroge, fascine, et témoigne de l'inspiration toujours intacte de l'un des plus grands réalisateurs en activité.

LE plus grand à mon sens.

Sans être aussi catégorique que l'ami Chao (parce que ton idée d'un "corps identitaire" est très juste), il me semble que le cinéma de Cronenberg dépasse, et depuis toujours, la simple question du corps et de sa place dans l'existence. Je ne dis pas que ce soit une vision fausse de son cinéma, juste que les interrogations qu'il soulève vont finalement bien au-delà.
Sinon pour ses derniers films (comprendre sa période post-eXistenZ), je suis toujours bien en peine d'en parler. Peut-être par son côté work in progress: comme si chaque film devait être lu à l'aune du suivant. Ainsi de A History of Violence, qui m'avait laissé sur la touche à la découverte pour le "découvrir" en le comparant à Eastern Promises. Je considère ces deux films comme deux des plus essentiels des années 2'000.

MJ a écrit: Je considère ces deux films comme deux des plus essentiels des années 2'000.

Je suis entièrement d'accord avec toi.

Pour répondre à Chao', je ne parle pas de la thématique du corps uniquement dans les derniers films de Cronenberg, mais dans l'ensemble de sa filmographie. C'est selon moi l'une des grandes forces de son cinéma: s'interroger sur le rapport de notre corps au monde, et sur notre propre rapport à lui.

lorenzo a écrit:

MJ a écrit: Je considère ces deux films comme deux des plus essentiels des années 2'000.

Je suis entièrement d'accord avec toi.

Pour répondre à Chao', je ne parle pas de la thématique du corps uniquement dans les derniers films de Cronenberg, mais dans l'ensemble de sa filmographie. C'est selon moi l'une des grandes forces de son cinéma: s'interroger sur le rapport de notre corps au monde, et sur notre propre rapport à lui.

J'avais bien compris que tu parlais de toute sa filmo. C'est justement cela qui me semble un peu poussé. Si c'est une des préocupation majeures de son cinéma jusqu'à CRASH (qui marque clairement un tournant dans sa filmo), par la suite ce n'est plus vraiment le cas je trouve. Mais on sur-analyse certains points -en mettant en parallèle ses "anciennes préoccupations"-, genre en en faisant des tonnes au niveau d'un mec qui est simplement tatoué car l'histoire le demande et non car Cronenberg veut parler du corps à tout prix.

Et en regard de sa filmographie, ce n'est pas juste le rapport du corps au monde ou je ne sais quoi qui l'intéresse. C'est plutôt la mutation qu'entreprend ce corps pour (re)devenir pleinement ce qu'il est (était) destiné à être.
Et que cette mutation soit physique ou psychologique (comme dans ses derniers films).
En un sens le cinéma de Cronenberg est très politique.

Fantastic Mr. Fox de Wes Anderson
Clairement le Anderson que j'aime le moins. Beaucoup aimé l'animation et le style visuel, dommage que ça reste très artificiel. Alors que justement, l'artifice chez Anderson (le style omniprésent, les poses, les dialogues) donnent toujours naissance à une quantité de sentiments sous-jacents (toujours sur plus ou moins les même thèmes), ici j'ai trouvé qu'on était trop proche de la fable, avec des personnages pour la plupart trop archétipaux et pas suffisamment intéressant (là encore l'archétype est typique de Anderson, mais il y a toujours une valeur ajoutée). Du coup, malgré le brio technique général, avec une direction artistique délirante et un casting de voix génial, ça manque cruellement de consistance. Évidemment je le conseil quand même à tous les fan d'Anderson, ça reste un film très agréable.